Première Guerre Mondial, première (véritable) utilisation de véhicules motorisés pour combattre et se déplacer.
Elle mis en lumière le caractère stratégique du pétrole et, surtout, souligné la dépendance dramatique dans laquelle se trouvait la France pour ses approvisionnements en or noir.
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Décembre 1918, Georges Clemenceau accepte de laisser aux Anglais la région de Mossoul, il n’est pas prêt pour autant à renoncer au pétrole irakien.
Qu’il était loin le temps où le président du Conseil pouvait répondre ironiquement, à ceux qui lui parlaient de pétrole : « Lorsque j’ai besoin d’huile, je vais chez mon épicier ! » C’était avant 1914.
La gestion de l'essence pendant les deux premières années
Avant la guerre, l’armée française ne possède pas de véhicules automobiles. Les problèmes d’essence n’ont donc pas été étudiés avec une grande précision.
Dès le début des hostilités, des engins motorisés sont réquisitionnés, ainsi que les stocks d’essence des sociétés pétrolières pour pouvoir les faire fonctionner. Ces stocks représentent quatre mois de consommation, ce qui correspond, dans toutes les analyses, à la durée prévisible de la guerre. Rapidement l’armée demande aux pétroliers de s’organiser pour l’alimenter en carburant et d’avoir en permanence un certain stock à disposition.
Les dix sociétés pétrolières françaises remettent donc en activité leurs raffineries, qui avaient heureusement toutes été soigneusement entretenues, bien que mise en sommeil depuis les lois de 1903-1908. […] Pendant deux ans, les pétrolier français réussissent à maintenir leurs stocks et à fournir l’armée dont les besoins s’accroissent constamment. Outre l’Europe Centrale, Sumatra ou Bornéo, les importations de pétrole brut se font principalement des États-Unis, du Mexique et de Trinidad.
La France dépourvue de pétrole
Le fonctionnement du système repose essentiellement sur la liberté des communications alliées avec les sources de production et sur la conservation du potentiel de transport.
La bataille de Verdun (février 1916) et de Saint-Mihiel vont bouleverser tout ça. L’approvisionnement du front par voie ferrée impossible, qui devra être remplacé par des camions, participera à l’augmentation de la consommation de 75%. C’est la « Guerre du pétrole ».
A partir de 1916, la France qui n’est plus en mesure de compter sur une partie importante de ses sources d’approvisionnement en Europe de l’Est, ne possède pas de pas de ressource provenant du sous-sol hexagonal.
En effet, depuis la découverte de la “fontaine à poix” de Pechelbronn en 1498 et sa mise en exploitation en 1735, la France ne possède véritablement aucun gisement pétrolifère sur son sol et ne dépend, pour son énergie, que des importations d’huiles étrangères.
Même si, en 1937, la moitié des importations pétrolières françaises se fait sous pavillon français, notamment avec le pétrolier “Emile Miguet”, le plus gros bateau pétrolier du moment (220.000 tonnes) et que la France possède alors 14 raffineries sur son sol, il faudra encore attendre quelques années pour que l’exploite les hydrocarbures extraits de notre territoire commence.
L'appel à Wilson
Une lettre du 5 décembre 1917 de la chambre syndicale avertit les pouvoirs publics qu’au 1er mars 1918 il n’y aurait plus de stocks de pétrole… Georges Clemenceau, auditionné par la commission générale du Pétrole, plaida pour des mesures de restriction et l’appel aux Américains.
Dix jours après le coup de semonce de la chambre syndicale, le 15 décembre 1917, Clemenceau envoyait un télégramme au président américain, Woodrow Wilson, destiné à un certain retentissement (et dont le texte est souvent déformé) :
« Au moment décisif de cette guerre, où l’année 1918 va ouvrir des opérations militaires capitales sur le front français, les armées ne doivent à aucun moment être exposées à manquer de l’essence nécessaire aux camions automobiles, à l’aviation et à l’artillerie de campagne par tracteurs […]. Si les Alliés ne veulent pas perdre la guerre, il faut que la France combattante, à l’heure du suprême choc germanique, possède l’essence aussi nécessaire que le sang dans les batailles de demain. ».
La réponse
Le Président américain comprit l’urgence de la situation, réussit à mobiliser une douzaine de gros navires capables de fournir les 100 000 tonnes attendues.
Le 20 décembre 1917, un premier câblogramme du gouvernement américain annonce la mise à disposition d’un premier navire le « Wilhelm Jebsen ». Ce bateau est suivi d’autres; au 10 janvier, la France est ravitaillée par dix-neuf navires totalisant 117 450 tonnes.
C’est un moment capital dans l’histoire de l’industrie pétrolière française. Il représente la réelle prise de conscience par les hautes autorités de l’aspect stratégique des produits pétroliers.
Le 29 mars 1918 fut créé un consortium pétrolier, inspiré du consortium du coton : l’État devenait acheteur unique, le 30 mars, et livrait le pétrole au consortium ; le capital du consortium était formé par les dix raffineurs qui devenaient en quelque sorte des agents de distribution achetant leurs produits à l’État et les revendant à un prix taxé.
Un monopole d'état
En fait était instauré un monopole d’État pour l’importation avec un acheteur unique face au vendeur américain, les entreprises privées étant réduites à un rôle en aval sans beaucoup de marge de manœuvre. Couronnement de la pyramide, le 21 août 1918, un commissariat général aux Essences et Combustibles héritait d’un véritable pouvoir d’exécution, et c’est Henry Bérenger qui en prit la tête (avec rang de ministre) d’août 1918 à février 1920.
Peu après l’armistice, une conférence interalliée du pétrole se tint à Londres le 21 novembre 1918. Lord Curzon déclara de façon imagée : « Vraiment, l’avenir dira que les Alliés ont flotté à la victoire sur une vague de pétrole. »
Sources : L’industrie pétrolière en France… (OpenEdition), bregail.com, geneanet.org, (Christian Rouxel) D’Azur à Total. Desmarais Frères, le premier grand pétrolier français (Drivers, 2007).…