Permis de conduire : l'entre deux guerres

Entre-deux-guerres : instauration de sanctions et professionnalisation de l’enseignement

L’époque de l’Entre-deux-guerres est à la recherche d’une réponse adaptée aux nouvelles nécessités liées à l’accroissement de la circulation routière et particulièrement au nombre grandissant des accidents, car le parc de véhicules en circulation explose. Les motocyclettes connaissent leur âge d’or. De 35 000 avant guerre, leur nombre dépasse 300 000 en 1928, et atteint 570 000 en 1934, puis décroît légèrement avec la criseA 1. Le parc de véhicules de tourisme passe quant à lui de 157 272 en 1920 à 1 800 000 en 1940 et le nombre de véhicules utilitaires de 79 076 à 500 000A 2. Entre 1920 et 1940, les motocyclettes aussi connaissent leur âge d’or en multipliant par 10 leur présence sur le marchéCDLR.

Il s’ensuit une réflexion sur les modes de répression qui permettraient aux forces de l’ordre de faire respecter le Code de la route. Dans une circulaire du 15 janvier 1923 le ministre de l’Intérieur Maurice Maunoury invente le « coup de sifflet du gendarme ». Il indique effectivement aux préfets qu’il conviendrait de « donner aux gendarmes le moyen de prévenir, pour arrêt, un automobiliste en faute » et en conséquence décide que « chaque militaire devra être muni d’un sifflet. (…) afin qu’à l’avenir tous les agents qualifiés pour dresser des contraventions en la matière imposent l’arrêt aux automobilistes en faute et les préviennent par l’émission d’un coup de sifflet suffisamment aigu et prolongé pour qu’il puisse être distinctement perçu par les contrevenants, en toutes circonstances. »20.

(Photo : illustration  « Autos-folies… (Photos N/B d’accidents des années ’20 et ’30) » © gatsbyonline.com)

"Aux Champs-Elysées, à l'Etoile, comme au Rond-Point ou à la Concorde, l'embouteillage atteint des proportions alarmantes. Paris est actuellement un vase clos où l'on introduit des voitures sans tenir compte des possibilités réelles. Les boulevards, nos grands carrefours, nos artères centrales sont massacrés. Il est temps de songer à un remède énergique car cette paralysie des transports engendre des retards graves et risque de ralentir l'intensité des échanges."

Suspension du permis de conduire

Dans cette logique, un décret du 12 avril 1927 prévoit une nouvelle mesure constituant une innovation importante : la suspension du permis de conduire. Le préfet peut suspendre le permis de façon provisoire avant la décision judiciaire.

Ce point est nouveau puisque le retrait administratif intervient dès lors avant la décision judiciaire, et par là même avant la déclaration de culpabilité. Le retrait administratif du permis de conduire comme simple mesure de police administrative, avant l’intervention du jugement pénal, était né20.

Le décret du 21 août 1928 précise ces modalités de suspension dans son article 29. Les préfets ont désormais la possibilité de prononcer la suspension du permis à la suite d’un homicide par imprudence ou de simples blessures par imprudence. L’annulation ou la suspension du permis est prononcée en cas de condamnation pour infraction au Code de la route. L’annulation est en particulier obligatoire lorsqu’il s’agit d’une condamnation aggravée pour ivresse ou délit de fuite 21.

Toutefois un arrêt du Conseil d’État du 25 novembre 1935 juge que la suspension par le préfet devait attendre la condamnation pénale définitive, ce qui ôtait presque toute efficacité préventive au système22.

(Photo : Les premiers permis de conduire. (EMILE FERNEY SOUVENIRS) © nouvelobs.com)

Naissance des voiturettes sans permis

Le décret du 18 décembre 1937 introduit une dispense du permis de conduire pour les véhicules automobiles présentant les conditions suivantes : un poids inférieur à 150 kg en ordre de marche, une cylindrée au plus égale à 100 cm3 et ne pas pouvoir dépasser en palier 20 km/h.

C’est l’origine des « voiturettes sans permis », qui vont exister en France jusqu’à nos jours, avec des modifications ultérieures substantielles, en matière de vitesse maximale notammentA 5.

(Photo : L’Œuf de 1938 (musée Schlumpf) © Cité de l’Automobile, Mulhouse – Wikipédia)

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