De 1989 à nos jours : le permis moderne

De 1989 à nos jours : le permis moderne

Permis à points : 15 ans de gestation

Deux avant-projets de loi relatifs à la création d’un permis à points ont été élaborés, en octobre 1974 par le ministère de l’Intérieur et en juin 1975 par le ministère de l’Équipement, mais c’est celui du projet du ministère de la Justice qui est présenté au CISR du 6 avril 1976, mais il ne sera pas présenté en session parlementaireA 9. Une mission sur le permis à points est alors confiée par le Ministre de la Justice Alain Peyrefitte à son ex-suppléant, le député Étienne Pinte, en septembre 1979. Le dépôt de son rapport est prévu pour avril 1980, mais Pinte réclame des délais à plusieurs reprises et finalement ne produira jamais son rapportA 9. En 1985, le Ministre des Transports indique que le délai de mise en place de la mesure serait important car l’infrastructure n’est pas là. Le fichier national des permis de conduire, outil indispensable pour le permis à points, existe bien mais il est encore tenu manuellement dans beaucoup de départementsA 10. En outre la crainte de l’impopularité de la mesure est forte. Le principe est d’attribuer un capital de points au titulaire du permis de conduire qui peut par la suite être diminué d’un nombre de points proportionnels à la gravité de l’infraction. Un solde de points nul entraîne l’invalidité du permis de conduire.

Finalement, le « permis à points » n’est voté que le 12 juillet 1989 et mis en application durant l’été 1992 dans la pagaille née d’une vive réaction des chauffeurs routiers. Il est modifié en conséquence la même année avec un capital de points qui passe de 6 à 12 pointsA 11. Cette mesure fera paradoxalement chuter le nombre de retraits de permis et ne sera pas réellement opérationnelle avant 2002A 12.

(Photo : Permis de conduire à  points © auto-ecole-assur.com)

Années 1990 : Conduite accompagnée et compléments sur les permis spéciaux

Des expérimentations de l’apprentissage anticipé de la conduite – que le langage courant a baptisé « conduite accompagnée » – ont lieu dans les Yvelines et dans l’Essonne, avant que la mesure ne soit étendue à tous les départements en trois étapes de 1986 à 1988A 13. Une circulaire du . définit les modalités d’expérimentation de la conduite accompagnée pour la formation des motocyclistesA 14.

En 1994, le permis de conduire est désormais plastifié sur le premier volet. En 1995 les conducteurs des entreprises professionnelles du transport routier de marchandises sont soumis à des formations complémentaires au permis de conduire (FIMO et FCOS). En 2004, ce dispositif a été étendu aux conducteurs salariés des entreprises effectuant des transports privés de marchandises pour leur compte propre en 2004. En 2009 sont désormais soumis à une obligation de qualification initiale et de formation continue tous les conducteurs de véhicules pour la conduite desquels est requis un permis de conduire de catégorie C ou EC35.

Avec le décret du  et son article R. 125-1, un titulaire du permis B peut conduire une motocyclette légère (jusqu’à 125 cm3) dès lors que le permis de conduire a été délivré plus de deux ans auparavant. Un titulaire de permis de conduire depuis moins de deux ans peut quant à lui tout de même conduire une motocyclette de moins de 80 cm3 munie d’un embrayage et d’un changement de vitesses automatique. L’article R. 124-2 du code de la route indique qu’un titulaire du permis A ne peut conduire une motocyclette dont la puissance est supérieure à 25 kW, ce qui correspond à 34 ch, que s’il dispose de son permis de conduire depuis plus de deux ans. Néanmoins cette condition n’est pas exigée pour les personnes âgées d’au moins 21 ans ayant passé avec succès une épreuve pratique. De plus la possession des permis A et B autorise la conduite des tricycles à moteur et des quadricycles lourds à moteur36.

(Photo : Disque à apposer à l’arrière des véhicules en conduite accompagnée © Wikipédia)

Années 2000 : permis probatoire et contrôle médical

La loi du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière institue un « permis probatoire » pendant 3 ans pour les nouveaux conducteurs avec un nombre de points réduit à 6 au lieu de 12. Il entre en application le 1er mars 2004. Cette disposition est en fait très en deçà de ce que proposait le livre blanc sur la sécurité routière de 1988 établi par une commission d’experts présidée par Pierre Giraudet, missionnée par Georges Sarre, secrétaire d’État auprès du ministre des transports, et sur demande du Premier ministre Michel RocardA 15. Cette commission préconisait en effet la mise en place d’un « permis provisoire »A 15.

Un accord-cadre du  définit la mise en place d’une formation obligatoire des conducteurs des entreprises exerçant des activités de transport interurbain de voyageurs. Cette formation doit avoir une durée minimale de 4 semaines, soit 140 heures. En sont exemptés certains conducteurs dont ceux déjà titulaires du CAP d’agent d’accueil et de conduite routière ou du CFP de conducteur routier37.

Si le code de 1954 définissait déjà une liste d’affections médicales incompatibles avec la conduite d’un véhicule, l’arrêté du  (modifiant le précédent arrêté du 8 février 199938) en dresse une liste exhaustive et institue un contrôle médical. Deux groupes de catégories sont définies : le groupe léger [A, B et E (B)] et le groupe lourd [C, D, E (C) et E (D)] . Cet arrêté est modifié à la marge en 201039 et les modalités du contrôle médical sont précisées en 201240,41.

(Photo : Illustration article « La vie des idées » © laviedesidees.fr)

Années 2010 : grande réforme du permis et permis électronique

À la demande du président de la République, Nicolas Sarkozy, un projet de réforme du permis de conduire est engagé en 2008Jean-Louis Borloo, ministre d’État, ministre de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire, et Dominique Bussereau, secrétaire d’État chargé des Transports, demandent un rapport sur « La formation à la conduite et l’examen du permis de conduire ». Celui-ci, remis en mai 2008, fait trois constats. Le permis n’est d’abord pas assez efficace en matière de sécurité routière : les jeunes de 18 à 25 se tuent deux fois plus sur les routes que les autres automobilistes. Il est trop long à obtenir en raison notamment du taux d’échec à l’épreuve de conduite ; il faut entre 1 et 9 mois selon les écoles et les départements pour pouvoir repasser l’examen. Et enfin il est trop cher : l’inscription et le passage de l’examen du permis de conduire sont gratuits, la préparation coûte 1 200 euros en moyenne – ce qui situe la France dans la norme européenne en la matière. Il faut rajouter de 500 à 800 euros pour le repasser en cas d’échec en première présentation (essentiellement coût des leçons supplémentaires)42.

Sur décision du Comité interministériel de la sécurité routière réuni le  et présidé par le Premier ministre François Fillon, 15 mesures sont engagées pour résorber les retards constatés pour le passage du permis, le rendre plus accessible financièrement, notamment aux plus démunis, et modifier son contenu afin de le rendre plus sûr42.

En 2011, deux mesures d’assouplissement sont prises concernant le permis à points. Le délai de récupération de 12 points de permis est désormais de deux ans (contre trois ans auparavant), à l’exclusion des délits routiers et des contraventions de 4e et 5e classes pour lesquels les règles demeurent inchangées et le délai de récupération d’un point de permis est désormais de six mois (contre un an auparavant)43,44.

En 2012, trois ans après la réforme, un bilan peut être fait. Depuis 2009, selon les pouvoirs publics, le délai de passage du permis de conduire a été réduit à deux mois dans 80 % des départements. Le permis est plus accessible grâce au permis à un euro par jour. Le dispositif est adressé aux jeunes de 16 à 25 ans qui bénéficient d’un prêt sans intérêt et sans frais de dossier (la part prise en charge par l’État) allant jusqu’à 1 000  remboursables sur une durée de 20 à 40 mois. L’action est rendue possible grâce à des conventions signées entre l’État et les écoles de conduite et entre l’État et certains établissements financiers. Le permis serait également plus sûr grâce à une nouvelle banque de questions à l’épreuve théorique mise en place en 2010 et une nouvelle grille d’évaluation pour le passage de l’épreuve de conduite. L’examinateur peut en particulier autoriser le candidat au permis de conduire à se diriger, à sa convenance, vers un endroit choisi au préalable, et ce pendant 5 minutes. Le but est d’évaluer la capacité du candidat au permis de conduire à gérer son déplacement de manière autonome. De plus, le candidat au permis de conduire aura la liberté de choisir un emplacement où il devra effectuer deux manœuvres de son choix également (exemple : créneau, marche arrière, etc.)45.

En 2013 entre en vigueur le nouveau permis à puce biométrique, dit « permis de conduire électronique », en application du décret du 46, transposant la directive européenne du  qui oblige les états membres de l’Union européenne, c’est-à-dire 27 pays, à commencer la distribution de ces nouveaux permis à puce biométriques, dès début 201347. Ce décret crée également six nouvelles catégories ou sous-catégories : AM, A2, C1, C1E, D1 et D1E46,48.

(Photo : Permis de conduire français © leblogauto.com)

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